Selon les marques, selon les secteurs d'activité, selon les pays, les vendeurs en boutiques sont rémunérés de manière différente. Le niveau de rémunération varie mais aussi le système de rémunération.
La commission sur les ventes individuelles a longtemps été pratiquée dans les boutiques de prêt-à-porter haut de gamme. Cette pratique était inspirée de celle des commerçants indépendants.
La marque Kenzo illustre bien le revirement qui a eu lieu. Jusqu'au début des années 2000, les vendeurs Kenzo étaient payés "à la commission". Il y avait des vendeurs "stars" qui géraient leur clientèle et dégageaient un chiffre d'affaires dont l'entreprise était fière. Pourtant, l'ambiance de travail était difficile, le management était autoritaire dans les boutiques et on entendait des clients se plaindre de l'insistance des vendeurs. Kenzo a depuis changé son fusil d'épaule : la qualité de service et l'ambiance de travail ont ainsi changé.
Les grandes marques ont ainsi pris conscience de plusieurs incidences du système de commission sur les ventes :
- cela créé de graves tensions relationnelles dans le magasin
- comme les boutiques sont de plus en plus prospères, les salaires deviennent très élevés et créent une tension entre les anciens et les nouveaux vendeurs.
- Le développement des ventes "forcées" avec clients insatisfaits surtout en périodes plus difficiles.
Certaines boutiques de prêt-à-porter de luxe ont donc adopté un système de rémunération sans commission individuelle sur les ventes mais avec des primes basées sur l'atteinte des objectifs du magasin. Ceci afin
- de créer un esprit d'équipe,
- de supprimer les comportements de stars chez les vendeurs
- de valoriser le service client et le conseil...
On a laissé derrière la valorisation de la performance individuelle, mais le service à la clientèle s'est beaucoup amélioré. Les chiffres ont-ils été au rendez-vous ? Oui, surtout pour les marques qui surfent sur la vague du succès.
Ce secteur n'a toujours pas trouvé le système de rémunération idéal. Favoriser les ventes et offrir un service client digne de la marque, exige un système global de motivation qui valorise le service, le travail en équipe et les performances individuelles.
Cela passe par un système de rémunération mixant le collectif et l'individuel mais aussi par un mode de management qui valorise et développe les compétences et les performances.
Pourtant, on sait que dans la joaillerie, les vendeurs sont rémunérés majoritairement à la commission. Le service, dans ce secteur est souvent exemplaire. Le système de commission n'aurait donc pas d'impact sur la qualité du service ?
S'agit t'il des mêmes profils de vendeurs que dans le prêt-à-porter ?
Quelle est la culture du service transmise par le management dans la joaillerie ?
Lorsque j'ai eu la chance de rencontrer les frères Mitchell, fameux patrons de Richards et de Mitchells dans le Connecticut aux USA (voir référence livre ci-contre), ils m'ont révélé que leur choix naturel de mode de rémunération était la commission sur les ventes. Ce système est le plus répandu aux Etats Unis et correspond bien à la culture Américaine car il n'est pas en conflit avec la qualité de service comme chez les "latins".
Quand ils ont racheté le magasin Richards, le système de rémunération était fondé sur des primes individuelles et collectives et non des commissions individuelles. Les frères Mitchell ont décidé de conserver ce système et ont appliqué par ailleurs leurs méthodes si reconnues de leur magasin familial Mitchells. Ils ont obtenu les mêmes résultats en termes commerciaux et de service. Plus de 50 M$ chacun.
"N'y a t'il pas de différence ?"
Bill Mitchell m'a expliqué que la différence se situe dans le management des équipes. La commission nécessite un management beaucoup plus fort, plus présent, imposant des règles, arbitrant fréquemment, conciliant les personnalités...L'absence de commission apporte une sérénité et une harmonie de travail qui favorise un management des équipes plus souple.
Si, aux Etats Unis, le choix du système de rémunération à la
commission ou non n'a pas d'incidence sur les ventes et le service
lorsque le management est adapté,
si, dans la joaillerie, le choix de la commission a une incidence positive sur les ventes et le service,
en revanche, il est clair que ce choix révèle la culture de l'entreprise.
C'est beaucoup plus en fonction de la culture de l'entreprise et des
pratiques de l'environnement concurrentiel que le niveau et le mode de
rémunération sont choisis. Leur différence d'impact dépendra du management et du profil des acteurs de la vente.
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